Dorothy Ashby

1932-1986

Harpiste et compositrice américaine

 

Une enfant de Détroit

Dorothy Ashby naît et vit la majorité de sa vie à Détroit, ville du Nord des États-Unis connue pour avoir accueilli au fil du 20e siècle un très grand nombre d’ouvriers noirs, attirés par les emplois de l’industrie automobile. Cette exceptionnelle concentration de résident·e·s afro-américain·e·s (82% de la population locale en 2010) a fait de la Motor City l’un des berceaux de la création musicale noire, et le lieu de naissance du célèbre label de soul et de rhythm and blues, Motown Records.
Dorothy Ashby joue un rôle important dans la reconnaissance des artistes de sa cité, et y implante nombre de ses activités, mais, face à la violence des tensions raciales, elle finit par migrer vers la côte Ouest en 1973, et finit sa vie près de Los Angeles.

The Ashby Theater Company

Très impliquée dans la vie locale de Détroit, elle crée en 1962 avec son mari la fondation Aid to the Creative Arts, pour financer des bourses en arts. Cinq ans plus tard, ils inaugurent The Ashby Theater Company, une compagnie de théâtre exclusivement afro-américaine qui présente des pièces et des comédies musicales militantes et révolutionnaires, dans la lignée du Black Arts Movement à New York à la même époque.
En plus d’interpréter un rôle sur scène et de composer toute la musique, Dorothy Ashby joue avec son trio pendant les entractes. Les spectacles rencontrent un immense succès, mais le théâtre est partiellement détruit pendant les émeutes de juillet 1967. Malgré cela, l’aventure dure jusqu’en 1972.

Engagée pour les droits civiques

Sans être révolutionnaire, Ashby était engagée pour les droits civiques, notamment à travers sa compagnie de théâtre. Néanmoins, suite à une opportunité de dernière minute, elle se produit le 14 février 1965 avec son trio à l’occasion du « First Annual Dignity Projection and Scholarships Award Night » à Détroit, une cérémonie de remise de prix organisée par la Afro American Broadcasting Company, où Malcolm X a prononcé son dernier grand discours public. Il est mort sept jours plus tard, le 21 février 1965.

Soul & Funk

À la fin des années 1960, sous l’impulsion du producteur Richard Evans, Dorothy Ashby s’ouvre à d’autres styles et incorpore des éléments de soul et de funk dans ses trois albums « Afro-Harping » (1968), « Dorothy’s Harp » (1969) et « The Rubáiyát of Dorothy Ashby » (1970).
En tant que sidewoman, elle enregistre aussi pour Bill Withers, Stevie Wonder ou Billy Preston.

Une harpiste samplée par le hip-hop

Peu connue du grand public de son vivant, sa musique sera pourtant régulièrement samplée par des artistes de hip hop. Entre les années 1980 et aujourd’hui, sa harpe se retrouve dans les morceaux des plus grands producteurs du genre : J. Dilla, Jay-Z, Madlib, Drake, Pete Rock, Flying Lotus et bien d’autres. Parmi les exemples les plus connus : Drop de The Pharcyde, qui reprend son titre Django, ou Final Fantasy de Drake, qui utilise The Windmills Of Your Mind.


Un peu de lecture

Julian Lucas, How Dorothy Ashby Made the Harp Swing, The New Yorker, 9 juin 2023.