Mary Lou Williams

1910–1981

Pianiste et compositrice américaine

 

“The First Lady in Jazz”

Mary Lou Williams doit ce surnom à son rôle central dans l’histoire de cette musique, et d’avoir épousé, voire préfiguré, son évolution. Elle en a traversé plusieurs décennies, influençant différents styles, depuis le swing jusqu’au bebop. Son surnom reflète non seulement son immense talent de pianiste et de compositrice, mais aussi son rôle de pionnière dans un domaine dominé par les hommes. Sa capacité à s’adapter et à évoluer avec les courants musicaux a solidifié sa réputation faisant d’elle l’une des figures majeures du jazz​.

L’oreille absolue

Une véritable prodige musicale ! Dotée de l’oreille absolue, Mary Lou Williams est capable de reproduire à la perfection tout ce qu’elle entend, ce qui lui permet de se démarquer très jeune dans le monde de la musique. Dès l’âge de 6 ans, surnommée la « Little Piano Girl », elle gagne déjà sa vie en jouant du piano.

Big Bands

Mary Lou Williams est une des rares femmes afro-américaines instrumentistes, arrangeuses et compositrices de jazz de son époque, où les figures féminines sont souvent cantonnées au chant. Dès les années 30, elle intègre le Andy Kirk and His Twelve Clouds of Joy comme pianiste et compositrice, et complète sa formation musicale auprès du saxophoniste américain. Elle devient un élément essentiel du style de l’orchestre, naviguant, selon les périodes et les morceaux, entre stride, swing et inspiration boogie woogie.
À la même période, elle compose également pour les orchestres de Benny Goodman et de Duke Ellington.

Zodiac Suite

En 1945, elle compose l’une de ses œuvres phares Zodiac Suite, un portrait musical des 12 signes du zodiaque, mêlant jazz et musique classique. Chaque partie est dédiée à l’un·e de ses ami·e·s en fonction de son signe ; l’œuvre s’ouvre ainsi avec le Bélier et une dédicace à Ben Webster et Billie Holiday. Les pièces sont nées d’improvisations que la pianiste interprète dans une émission de radio hebdomadaire diffusée sur la station new-yorkaise WNEW. Dans ce programme en forme d’atelier musical, elle convie des stars du bebop et joue parfois des airs musicaux en lien avec les prédictions astrologiques diffusées à l’antenne.
Après un enregistrement en trio, Mary Lou Williams réalise plusieurs orchestrations de sa Zodiac Suite. Une version pour orchestre de chambre est jouée au Town Hall à New York en décembre 1945, puis une autre pour orchestre symphonique au Carnegie Hall en 1946. En 1957, elle rejoint l’orchestre de Dizzy Gillespie au festival de Newport pour en interpréter des extraits, arrangés pour l’occasion par Melba Liston.

Black Christ of the Andes

Au cours des années 60, après s’être convertie au catholicisme quelques années auparavant, Mary Lou Williams se concentre sur l’écriture de musique sacrée. La canonisation par l’Église catholique en 1962 du premier Saint noir, Martin de Porrès, l’inspire pour composer Mary Lou Williams Presents Black Christ of the Andes (1963). Dans  cette œuvre vocale en l’honneur du religieux, qui incorpore une variété de styles allant des spirituals au blues en passant par le jazz. L’œuvre complète est jouée pour la première fois à l’église St. Francis Xavier de New York en novembre 1962, puis enregistrée en octobre 1963. En parallèle, elle fonde Mary Records, devenant la première musicienne afro-américaine à créer son label.

À la limite de l’avant-garde à l’époque de sa création, Black Christ of the Andes, est aujourd’hui considérée comme une œuvre musicale essentielle.


Un peu de lecture

Tammy L. Kernodle, Soul on Soul, The Life and Music of Mary Lou Williams
University of Illinois Press, 2020